Michel Melot est un ancien conservateur de la Bibliothèque nationale de France (BnF) et ancien directeur de la Bibliothèque publique d’information du Centre G. Pompidou. Après sa sortie de l’École des chartes, il dirigera pendant deux ans le département des estampes et de la photographie à la Bibliothèque nationale en tant que conservateur. Michel Melot est un spécialiste de l’Abbaye royale de Fontevraud. Il est notamment l’auteur de la thèse intitulée “L’abbaye de Fontevrault de la réforme de 1458 à nos jours : étude archéologique”, thèse qui lui permettra d’obtenir le diplôme d’archiviste paléographe en 1967. En juin 2022, il publie le livre intitulé “Histoire de l’abbaye de Fontevraud – Notre-Dame-des-pleurs 1101-1793″ qui raconte, sur près de huit siècles, l’histoire exceptionnelle de l’Abbaye royale de Fontevraud.
Dans le dernier numéro de la revue culturelle des Pays de la Loire « 303 arts, recherches, créations », la part belle est faite aux collections du Musée d’art moderne de l’Abbaye de Fontevraud. Ce dernier volume de la revue est consacré au Masques. Sujet étonnant et on ne peut plus large. Ce terme nous évoque aujourd’hui une période pas si lointaine où cet objet, dont on ne prononçait autrefois quasiment jamais le nom, est devenu l’un des accessoires les plus importants de notre quotidien. Le masque est un objet très particulier qui nous protège, sur le plan sanitaire, sur le plan de l’identité, sur le plan des émotions… Du carnaval, à la médecine en passant par le monde du travail et l’art, la revue « embrasse la diversité des masques, et leur pouvoir de reconfigurer notre rapport à soi et à l’autre. » Dans les premières pages, la plume a été confiée à Dominique Gagneux, directrice du Musée d’art moderne de Fontevraud. Sur plusieurs très belles pages, elle revient sur l’étonnante et hétéroclite collection du musée fondée grâce à une donation des époux Cligman, amoureux (d’art). Parmi les peintures, sculptures et autres créations, on trouve d’innombrables masques aux origines multiples et aux temporalités tout aussi variées. Ces quelques pages sont donc l’occasion de se plonger dans ces collections et plus particulièrement dans ces objets d’art, leur histoire, leur symbolique, leur présence dans la collection du couple de collectionneurs… Pour en apprendre davantage, retrouvez l’article complet dans la dernière revue 303 disponibles à partir du 17 novembre 2022. https://www.editions303.com/le-catalogue/masques/
A propos de Dominique Gagneux : Spécialiste de l’histoire de l’art du 20e siècle, Dominique Gagneux a été conservatrice en chef au musée d’Art Moderne de Paris. En 2018, elle a été nommée pour préfigurer puis diriger le musée d’art moderne de Fontevraud, collections nationales Martine et Léon Cligman inauguré en 2021.
Dans la dernière revue des éditions 303 consacrée aux « masques », plusieurs pages sont dédiées aux collections du musée d’art moderne de l’Abbaye de Fontevraud sous la plume de la directrice du musée.
La commune de Fontevraud-l’Abbaye est souvent perçue comme un bourg monastique, développé progressivement autour de l’Abbaye Royale. Un inventaire du patrimoine de cette commune a été l’occasion d’une relecture de l’Histoire, où l’on découvre que l’abbaye eut un rôle bien plus complexe dans la formation du village. Dans ce nouveau volet de l’histoire locale, retour sur la vie dans et en dehors de l’abbaye de Fontevraud.
Quand Robert d’Arbrissel fonde l’Abbaye de Fontevraud en 1101 dans une clairière sans doute peu peuplée, sa communauté s’installe d’abord dans des « cabanes ». Cependant, moniales et frères s’organisent très vite en couvents stricts et se dotent en quelques décennies de bâtiments majeurs qui forment aujourd’hui encore les grands traits de l’Abbaye Royale. Dans le même temps, les laïcs qui accompagnent ces premiers développements sont progressivement mis à l’écart. Le statut des frères proscrit ainsi de leur céder des terres à proximité pour s’y établir. Plus encore, trois papes successifs interdisent, en 1119, 1137 et 1150, toute habitation de laïcs auprès de l’abbaye et de ses prieurés. Il s’agit surtout de garantir la tranquillité d’une retraite spirituelle et de protéger les religieuses, dont bon nombre sont de très nobles familles, de toute atteinte et de tout scandale. Les abords du monastère sont ainsi gelés, voire sanctuarisés, par des terres exploitées par l’Abbaye Royale comme par un vaste cimetière ? L’habitat villageois ne peut dès lors se constituer qu’au sein des hameaux disséminés, dont le principal est longtemps celui des Roches, à près d’un kilomètre au Nord.
Les étapes du rapprochement
Quand l’Abbaye Royale perd peu à peu de sa puissance, elle doit composer avec des empiètements, et des habitants se rapprochent. A la fin du 13e siècle, des maisons sont mentionnées près de l’église paroissiale, de la porte de la « trappe » ou un peu plus au Sud, à l’Ânerie. Au début du 16e siècle, Fontevraud se réforme et retrouve de sa superbe : en 1504 une clôture de 6 mètres de haut est construite, qui isole nettement les couvents féminins. L’Abbaye Royale ne semble plus craindre la promiscuité villageoise. Les abbesses stimulent même une certaine effervescence en proximité. Elles obtiennent en 1549 la création d’un marché et la construction de halles sur une portion du cimetière, puis concèdent vers 1577 des terres voisines, à condition qu’y soient implantées des maisons. L’immense cimetière est amputé plusieurs fois encore au 18e siècle pour installer un champ de foire et de nouveaux bâtiments. Ce développement reste toutefois limité : en 1789, la rue Robert d’Arbrissel, principale artère actuelle, n’est pas encore complètement bordée de maisons et les hameaux accueillent toujours la majorité du peuplement.
Après la suppression de l’abbaye, les vides se comblent
Durant la Révolution, l’Abbaye Royale est dissoute et saisie comme bien national. Les espaces qui l’entouraient sont vendus : sur 40 hectares presque d’un seul tenant, seuls 8 restent dans acquéreur – l’espace aujourd’hui ouvert à la visite –, dont l’État fait une prison. De nombreuses constructions monastiques deviennent donc parties constituante du bâti villageois. Par ailleurs, le grand cimetière paroissial est transféré hors du village en 1814. D’immenses parcelles deviennent ainsi constructibles. Le village se densifie. Au fil du temps, des maisons s’alignent au long de nouvelles voies, qui s’étirent jusqu’à rattacher les hameaux au bourg. L’allotissement du Grand Clos, cœur géographique du bourg, parachève enfin, et depuis 1992 seulement, un processus de constitution villageoise entamé il y a plus de 900 ans. Ainsi, aux yeux du visiteur, Fontevraud-l’Abbaye paraît aujourd’hui un village désarticulé et tentaculaire, qu’il traverse longuement avant d’atteindre les portes de l’Abbaye Royale.
Vivre à l’Abbaye
Au fil de l’histoire, au temps de l’ordre fontevriste comme lors de la période carcérale, nombreux étaient ceux qui vivaient dans l’Abbaye Royale pour en assurer l’administration et l’entretien. Une petite ville, en perpétuelle transformation.
Les pensionnaires de l’Abbaye : Les « commensaux », officiers, employés, et pensionnaires de l’Abbaye Royale pouvaient être nombreux. En 1640, Jean Lardier, bibliothécaire et historien de l’ordre de Fontevraud, y recense ainsi pas moins de 90 personnes au service de la cité monastique : intendant, médecin, chirurgien, apothicaire, boulanger, boucher, forestier, « botcheleur » (chargé de la distribution du foin)…
Boulanger et boucher, juge et sacristains : Ces personnes vivaient, en famille quand elles étaient mariées, dans la Grande Clôture, c’est-à-dire dans la clôture générale, distincte de celle des religieuses. L’Abbaye Royale comptait ainsi une tonnellerie, une buanderie, un moulin, une boulangerie, une graineterie, une boucherie, des écuries (« fannerie »), des logements pour le médecin et le chirurgien… Aujourd’hui encore, plusieurs édifices, vendus comme biens nationaux à la Révolution, témoignent de ces anciennes affectations. La « secrétainerie », au nord de l’abbatiale, abritait les sacristains. Au fil du temps, ses usages varièrent, du logement des frères convers à l’hébergement d’hôtes de passage. À proximité se trouve le logis du sénéchal : cette bâtisse abritait, au 18e siècle, le sénéchal de l’Abbaye, dont la fonction était de rendre justice pour le compte de l’abbesse. Il exerçait sa fonction dans le tribunal situé au premier étage des anciennes halles (emplacement actuel de la mairie).
Le directeur de la prison chez l’abbesse : Durant la période carcérale, certains personnels pénitentiaires disposent d’un logement de fonction, sur place. Le directeur est installé dans un appartement de 250 m2 dans l’ancien logement de l’abbesse, le palais abbatial, dans la cour d’honneur. Aujourd’hui, on y accueille les artistes en résidence. L’économe, mais aussi le médecin de la centrale, ou encore le coiffeur de l’administration pénitentiaire, possèdent eux aussi leur logement de fonction. Ceux de l’économe et du coiffeur – strictement identiques, bâtis au début du 19e siècle par l’ingénieur Charles-Marie Normand – encadrent la cour de l’écrou et disposent d’une cave et d’un jardin privatif entièrement clos. Le logis de l’économe, restauré en 2011, est aujourd’hui appelé « Pavillon Normand » et accueille des équipes de Fontevraud. En 1828, on construit dans la cour d’entrée le « casernement », pour abriter la compagnie d’infanterie chargée de la garde de la prison. Après avoir tenu lieu de salle des fêtes de la commune et de salle d’exposition, c’est aujourd’hui le bâtiment d’accueil des visiteurs.
Par décret du 22 août 2013 publié au Journal Officiel du 24 août 2013 a été classé parmi les sites du département du Maine-et-Loire, le site de l’abbaye de Fontevraud et de ses abords, sur le territoire de la commune de Fontevraud-l’Abbaye.
Le périmètre de classement intègre, sur plus de 175 hectares, l’ensemble abbatial, cœur du bien justifiant la protection, ses abords immédiats, ainsi que le grand paysage dans lequel il s’inscrit. Ce périmètre, relativement étendu par rapport à l’ensemble abbatial, prend toute la mesure des vues sur l’édifice dont le caractère est exceptionnellement préservé, notamment le cadran sud/sud-est. Il recouvre pour l’essentiel des espaces à dominante naturelle, les lignes de crête, les coteaux boisés ainsi que les terres agricoles environnantes perceptibles depuis l’abbaye.
Outre la préservation sur les vues, la délimitation permet d’inclure tout un ensemble d’éléments de patrimoine disséminés aux abords de l’abbaye ainsi que deux villages-rues témoins d’une occupation très ancienne et qui participent directement de la qualité du paysage. La gestion du tissu urbain plus dense est confiée à l’AVAP qui a été approuvée par délibération de la commune de Fontevraud-l’Abbaye le 28 janvier 2013.
Ce classement au titre des sites, dont la valeur historique et pittoresque a été retenue par le Conseil d’Etat, s’inscrit dans un vaste programme de protections engagé dans le Val de Loire inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il complète ainsi les dispositifs de protection engagés et menés à terme dans le département de Maine-et-Loire sur :
* la Corniche angevine (décret du 11 février 2003),
* la Roche de Mûrs (décret du 25 avril 2007),* le Thoureil – Saint-Maur (décret du 3 juin 2008)
et enfin l’ensemble désigné Confluence Maine-Loire et coteaux angevins (23 février 2010).
La Chambre des cloches . Parcours campanaire. Petit guide pour comprendre voir et entendre les cloches. Abbaye royale de Fontevraud. Du 19 avril au 22 septembre 2019.